vendredi 10 juin 2016

Quand la nuit devient jour

"— (...) Je t'interdis de me juger, car tu n'as aucune idée de tout ce par quoi je suis passée pour en arriver là. Je vis un enfer depuis des années, je me mutile, je me blesse, je me fais saigner pour oublier à quel point chaque seconde de cette misérable existence est une lutte. Tu vois l'euthanasie comme une faiblesse ? Tu te trompes, ce sera ma délivrance !"


Auteur : Sophie Jomain
Editeur : Pygmalion
Genre : Contemporain
Date de parution : 27 avril 2016
Nombre de pages : 238
Prix : 16 €


4e de couverture

On m'a demandé un jour de définir ma douleur. Je sais dire ce que je ressens lorsque je m'enfonce une épine dans le pied, décrire l'échauffement d'une brûlure, parler des nœuds dans mon estomac quand j'ai trop mangé, de l'élancement lancinant d'une carie, mais je suis incapable d'expliquer ce qui me ronge de l'intérieur et qui me fait mal au-delà de toute souffrance que je connais déjà.
La dépression.
Ma faiblesse.
Le combat que je mène contre moi-même est sans fin, et personne n'est en mesure de m'aider. Dieu, la science, la médecine, même l'amour des miens a échoué. Ils m'ont perdue. Sans doute depuis le début.
J'ai vingt-neuf ans, je m'appelle Camille, je suis franco-belge, et je vais mourir dans trois mois.
Le 6 avril 2016.
Par euthanasie volontaire assistée.

Mon Avis

J'avais vraiment envie de lire le dernier roman de Sophie Jomain. D'abord, parce que j'entends énormément parler de cette auteure, très connue dans la blogosphère, et je n'avais encore jamais lu un de ses livres. Deuxièmement, ce roman aborde deux thèmes encore tabous en France que sont la dépression et l'euthanasie volontaire assistée. Et enfin, j'avais cru comprendre que la lecture de ce roman était éprouvante et émouvante, donc, curieuse que je suis, je n'ai pas hésité une seconde pour me l'offrir.

Ce récit à la première personne narre l'histoire de Camille, une jeune femme de 29 ans. Elle a grandi entourée de parents aimants, elle n'a jamais manqué de rien. Mais elle souffre de dépression depuis l'enfance. Malgré plusieurs hospitalisations, cette maladie invisible lui fait subir d'horribles épreuves : boulimie, anorexie, auto-mutilation et tentatives de suicide. Pour Camille, c'est certain, elle ne guérira jamais. Pour partir dignement, elle décide de demander l'euthanasie assistée en Belgique. Son dossier validé, elle s'installe dans un centre médical belge en attendant la date de son euthanasie. Elle y rencontrera le Dr Peeters, un psychiatre profondément humain, qui bouleversera sa vie.

Camille raconte son parcours, depuis sa pré-adolescence jusqu'à sa décision finale, dans un long prologue d'environ 30 pages. Lorsque la date de son euthanasie a été fixée, le premier chapitre débute.
Ce long prologue nous relate ses souffrances intérieures, son combat et ceux de ses parents pour s'en sortir, et surtout ses nombreux échecs. Cette partie aurait peut-être mérité quelques développements. Néanmoins, est-ce vraiment utile dans un prologue ?
L'écriture est simple, brute, sans envolée littéraire et autres figures de style. C'est ce qui rend la plume de Sophie Jomain percutante. L'histoire de Camille ne peut que nous toucher. On apprend beaucoup sur la dépression grâce à ce livre. Oui, la dépression est une vraie maladie, invisible mais réelle, qui peut détruire une personne.  

La seconde partie du roman est caractérisée par l'apparition d'une romance entre Camille et le Dr Peeters. J'ai été moins convaincue par cette partie, cette romance ne m'ayant pas vraiment intéressée. Certes, le côté protecteur du médecin, si différent des autres, est touchant. Mais je trouve que cette romance arrive un peu comme un cheveu sur la soupe, et prend un peu trop d'ampleur à mon goût.


Par ailleurs, Camille est un personnage qui m'a étonnée de part sa force, sa détermination sans faille, sa maturité.


Ce que j'ai particulièrement apprécié dans ce roman, ce sont les confrontations de Camille face à ses parents. Ce sont des personnages formidables, prêts à tout pour aider leur fille, mais qui doivent faire face à sa décision. En tant que maman, ces deux personnages m'ont énormément touchée. Leurs réactions sont cohérentes. L'un, prenant cette décision comme une trahison, ne parle plus à Camille. L'autre garde toujours l'espoir d'une guérison future. Ainsi, l'auteure nous parle des souffrances de Camille, mais également de celles de ses parents.

Enfin, la fin du roman a été largement évoquée dans diverses chroniques. Au début, j'étais moi aussi un peu frustrée de cette fin ouverte. Mais au final, avec un peu de recul, c'était une fin appropriée. Elle permet de se faire notre propre idée, de faire marcher notre imagination, et ce n'est pas plus mal.



En conclusion, ce roman n'a pas dû être facile à écrire pour Sophie Jomain, mais pour moi elle a réussi son pari. Ce qui était important, en effet, c'était qu'elle l'écrive. Pour démêler le vrai du faux de cette maladie invisible qu'est la dépression, pour lever le voile sur les raisons d'un recours à l'euthanasie volontaire assistée.  Pour comprendre tout simplement. Ce roman m'a touchée, tout particulièrement le rapport entre Camille et ses parents. Il m'a, en tout cas, donné envie de lire d'autres romans de Sophie Jomain, dont j'apprécie beaucoup la plume.

Ma note : 16/20

A bientôt pour une nouvelle chronique ^^



2 commentaires:

  1. Ce roman me donne très envie il me touche particulièrement mais malheureusement il est quand même un peu chère pour le nombre de page. Hâte de le trouver en occasion

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    1. Je suis d'accord, c'est clair que c'est pas donné... J'ai vu que sur priceminister, il est à environ 10 euros mais sans compter les frais de port... Surveille aussi le site de Guibert Joseph, peut-être qu'ils l'auront bientôt en occasion.

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